Drones de loisir : le point sur les règles à respecter en 2018 ?


Rédigé par Arnaud QUILTON le Mercredi 26 Septembre 2018 à 15:15

L’utilisation des drones de loisir fait régulièrement l’objet de faits divers, comme en attestent le récent survol du Fort de Brégançon en août 2018 – alors que le Président de la République y séjournait – ou encore les nombreux incidents liés à l’utilisation de ces engins à proximité des centrales nucléaires françaises. Alors que l’on attend le questionnaire en ligne qui permettra d’obtenir l’attestation de formation de télépilote de loisirs, pour les drones de plus de 800g, faisons le point sur la règlementation avec la société d'avocats Avoconseil.



Une télépilote de loisirs contrôlant un drone grand public (photo Adobe Stock)
Force est de constater que la démocratisation des drones de loisir, du fait de leur prix particulièrement attractif pour certains d’entre eux, a engendré une recrudescence des incivilités et des actes malveillants commis par leur intermédiaire. Une majorité de leurs utilisateurs ne dispose d’aucune autorisation particulière et utilise leurs engins dans un cadre personnel en ignorant bien souvent l’existence d’une règlementation spécifique.

Pour autant, il existe une multitude de règles juridiques applicables en France depuis 2012, règles pouvant parfois paraître obscures pour un utilisateur non averti : il existe en effet à ce jour pas loin de 5 arrêtés ainsi qu’une loi venant encadrer l’utilisation des drones… ! De ce fait, il semble nécessaire de revenir sur les questions les plus fréquentes sur ce sujet.
 

Quelle est la définition juridique du drone ?

Tout d’abord, il apparaît opportun de signaler que le droit français, pourtant pionnier en la matière, ne reconnait pas le terme de « drone » mais celui, moins évident, d’« aéronef qui circule sans personne à bord ».
 

Quelle est la différence entre un drone de loisir et un drone à usage professionnel ?

Le droit français distingue principalement deux types d’utilisation des drones : ceux réservés à la compétition et aux loisirs rentrent dans la catégorie de l’aéromodélisme ; a contrario, ceux utilisés à des fins d’expérimentation ou d’activité particulière c’est-à-dire, dans la plupart des cas, à des fins professionnelles.

Pour cette dernière catégorie, une règlementation particulière vient s’appliquer avec notamment la nécessité d’obtenir une autorisation de vol délivrée par la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC). De plus, un arrêté de juillet 2018 a mis en place un examen théorique spécifique de télépilote : outre l’obtention obligatoire du Brevet d’ULM, une formation théorique incluant « des modules concernant la réglementation des drones » doit être suivie par les candidats.

A noter : sont assimilés à la catégorie de l’aéromodélisme les vols destinés à la formation d’un télépilote en vue d’une utilisation à des fins de loisirs ou de compétition, les vols de tests destinés à évaluer les performances d’un drone de loisir ou encore ceux ayant pour objet de faire une démonstration commerciale du drone de loisir.
 

Quelles sont les règles applicables pour les drones de loisir ou de compétition (aéromodélisme) ?

Nul n’étant censé ignorer la loi, il convient tout d’abord de rappeler que toute personne utilisant un drone de loisir se doit de se renseigner sur les règles applicables avant d’utiliser son engin. Au-delà de ces règles « de bon sens », il importe ensuite de souligner que le droit français ne vise à encadrer que l’utilisation dite extérieure des aéronefs. De ce fait, selon le législateur, un drone qui serait utilisé dans un espace clos et fermé ne serait assujetti à aucune règle spécifique… Evidemment, une telle utilisation ne comporterait que peu d’intérêt : faire voler son drone dans son appartement ou dans son garage apparaît être, sommes toutes, assez limité voire très risqué !

Par ailleurs, préalablement à tout vol, plusieurs points doivent être vérifiés par le télépilote :

- Le seuil des 800 grammes : l’année 2018 marque certainement une avancée majeure dans les règles applicables aux drones de loisir. En effet, depuis le mois de septembre 2018, les pilotes d’un appareil de 800 grammes et plus doivent passer une formation gratuite (et accessible en ligne) pour être autorisé à faire voler leur engin, ce qui n’était jusqu’ici pas requis. En cas de réussite de cet examen, une attestation de suivi de formation sera délivrée ; elle pourra être opposée aux autorités en cas de contrôle. Pour l’heure si une plateforme de formation existe (voir ICI), le QCM définitif qui permet d’obtenir l’attestation de formation de télépilote de loisir, a conserver sur sois lors des vols, n’est pas en encore disponible a l’heure où nous écrivons ces lignes.

De même, tous les drones de plus de 800 grammes doivent être immatriculés et disposer de dispositifs d’avertissements lumineux et sonores spécifiques dont les modalités de mise en place restent encore à affiner par le législateur. Enfin, les fabricants et les vendeurs d’occasion de ce type de drones doivent obligatoirement fournir une notice d’utilisation lors de la vente ou de la revente. Ce point est particulièrement important pour toutes les personnes souhaitant revendre leur drone de plus de 800 grammes. En dessous de ce seuil de 800 grammes, aucune autorisation préalable ou formation n’est pour l’instant requise, bien que cette dernière soit « recommandée » par les autorités.

- Le respect des zones de restriction : un utilisateur ne peut faire voler son aéronef de loisir n’importe où. Dans cette optique, il doit vérifier sur le site GEOPORTAIL si la zone de survol est interdite ou autorisée. A titre d’exemple, on peut remarquer que la ville de Paris y est quasi intégralement interdite de survol par les drones.

En outre, les zones habitées et l’espace public (voie publique, terrain ouvert au public…) sont exclues de tout survol, ce qui limite considérablement l’utilisation d’un drone. Il en va de même des espaces privés au-dessus desquels un drone ne peut être utilisé, sauf accord du propriétaire des lieux.

- Le respect d’une hauteur maximale de vol de 150 mètres (ou 50 mètres en zone sensible) : même si un drone peut aller bien plus haut, sa hauteur de vol est limitée à 150 mètres au- dessus du sol ou des eaux. De même, il est interdit de faire voler un drone à une hauteur supérieure à 50 mètres dans certaines zones considérées comme sensibles.

- L’interdiction de piloter un drone depuis un engin en mouvement : même si cela est assez évident, le législateur a jugé opportun de rappeler que toute utilisation du drone est prohibée lorsque le télépilote se trouve dans un véhicule en déplacement (voiture, moto, bateau etc.).

Page suivante :  quelques questions à se poser ....

Quelques questions intéressantes sur l’utilisation des drones de loisirs

Peut-on faire voler un drone de loisir de nuit ?
Même s’il est équipé d’un dispositif de signalisation lumineuse, un drone de loisir ne peut circuler que de jour, sauf obtention d’une dérogation préfectorale autorisant expressément le vol de nuit sur une zone bien précise.

Doit-on être assuré pour faire voler un drone de loisir ?
Il est fortement recommandé d’être assuré pour une telle utilisation même si cela n’est pas obligatoire. En effet, en cas de dommage causé par son drone, le télépilote est responsable de plein droit quant aux dommages causés aux biens et aux personnes, conformément à l’article L. 6131-2 du Code des transports.

Que risque-t-on en cas de non-respect de ces règles ?
Les sanctions prévues par le législateur sont particulièrement lourdes. L’utilisation d’un drone dans des conditions d’utilisation non conformes aux règles précitées est passible d’un an d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende en vertu de l’article L. 6232-4 du Code des transports.

De même, le survol d’un drone sur une portion du territoire français en violation d’une interdiction de survol est passible de 45 000 euros d’amende et 1 an de prison ainsi que de la confiscation du drone en vertu des articles L. 6232-12 et L 6232-13 du Code des transports.

Quelles sont les règles à respecter lorsque le drone est équipé d’une caméra ?
Au regard de l’article 9 du Code civil et de la législation sur la protection des données personnelles, tout drone équipé d’un tel dispositif (caméra, enregistreur de sons etc.) doit respecter la vie privée des tiers au sol s’ils sont identifiables. Dans un tel cas, le principe est donc l’obtention préalable du consentement de la personne dont les données personnelles (image, voix..) seront captées par l’aéronef.

Concernant les prises de vue aérienne, elles peuvent être réalisées à condition qu’elles le soient dans un but personnel (c’est-à-dire qu’elles ne soient pas communiquées au public). Néanmoins, certaines zones peuvent nécessiter une autorisation préalable comme le rappelle l’article D. 133-10 du Code de l’aviation civile. La prudence reste donc de mise en la matière.

Les autorités et l’administration fiscale peuvent-elles constater à l’aide d’un drone des infractions aux règles de l’urbanisme sur une propriété privée ?
A cette question pour le moins originale – mais au demeurant fort intéressante ! – posée par un sénateur, le Ministère de la cohésion des territoires a répondu, le 16 janvier 2018, par la négative. Il s’agissait en effet de déterminer si un drone pouvait procéder à des contrôles de propriétés privées aux fins de relever des éventuelles infractions aux règles d’urbanisme (non déclaration de création de piscines, constructions illégales, non-respect des normes environnementales etc.). Dans sa réponse, le ministère compétent indique que le principe du droit au respect de la vie privée prime et que la « captation d’images par la voie des airs au moyen d’un drone survolant une propriété privée peut être considérée comme une ingérence dans la vie privée ». De ce fait, tout élément de preuve recueilli par les autorités dans de telles conditions devra être considéré comme illégal. Ainsi, l’administration fiscale ou encore une municipalité ne pourra pas constater l’existence d’une construction frauduleuse à l’aide d’un drone dans le but de réévaluer en conséquence la taxe foncière du contrevenant.

L’ensemble des questions abordées dans le présent sujet démontre que les autorités françaises ont manifestement pris à bras le corps le sujet des drones. Pour autant, l’inflation normative propre à ce sujet – avec une multitude de textes et de codes simultanément applicables – engendre incontestablement des zones d’ombre pour un non juriste. Et ce constat risque encore de se renforcer, le législateur européen ayant lui aussi décidé de s’emparer de ce sujet en se fixant l’année 2021 comme date limite à l’uniformisation des règles à l’échelle de l’Union européenne. Autant dire que le cadre juridique des drones est loin d’être clarifié et stabilisé...





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